ARTISET 01 I 2023 29 La coopérative d’habitation autogérée Huebergass, à Berne, compte près de 400 personnes, dont de nombreuses familles et des gens dans des situations de vie très différentes. Si la cohabitation dans une communauté si diverse est un réel défi, l’architecture du lieu contribue largement au vivre ensemble. Elisabeth Seifert À Berne, quand on quitte la Huberstrasse pour s’engager dans la «Huebergass», c’est comme un voyage au cœur des pays du sud. La ruelle n’est pas en ligne droite mais dessine un long «S» à travers le quartier. Plusieurs bâtiments de trois étages de forme cubique sont alignés, au nord et au sud, en léger décalage afin de toujours permettre de nouvelles découvertes. Le regard est rapidement attiré par les structures en bois et les balcons suspendus aux façades des immeubles qui, tels des loggias, offrent une ouverture sur l’extérieur. Les balcons donnent tous sur la Huebergass, ce qui favorise les contacts sociaux dans la ruelle. On comprend vite que l’architecture vise à encourager les échanges et la cohésion sociale. Tous les appartements sont équipés de baies vitrées à deux ou trois vantaux à hauteur de sol laissant entrer la lumière et créant un lien avec le monde extérieur. L’effet communautaire est renforcé par les escaliers extérieurs qui, en plus de l’ascenseur intérieur, mènent directement de la Huebergass aux étages et aux appartements. Des locaux à usage communautaire sont aménagés au rez-de-chaussée des immeubles. À côté de l’indispensable buanderie se trouvent le «Quartierdepot», une sorte de magasin de quartier. Il y a également une salle de jeux pour les enfants, et même une crèche, des locaux à usages multiples et le Café Hueber, très spacieux, équipé d’une petite scène pour accueillir les événements les plus divers. «Un espace social vibrant d’énergie» Les gens qui habitent ici recherchent le contact social et veulent s’engager pour la communauté. Je m’en rends compte lors de ma visite du quartier, un lundi en début d’après-midi, par des températures plutôt fraîches. Les personnes que je croise me saluent aimablement. Et les banderoles accrochées aux structures en bois ou aux balcons attestent d’une forte sensibilité pour les questions sociales. «Le samedi, surtout en été, la Huebergass est un espace social vibrant d’énergie», affirme Raphael Burkhalter. Il est responsable de l’acquisition de projets dans la région de Berne pour le compte de la société immobilière Halter SA et membre du comité de la coopérative de développement «Wir sind Stadtgarten» (trad. «nous sommes un jardin urbain»), une filiale de Halter. Dans cette fonction, il a réalisé la «Huebergass» en tant que chef de projet aux côtés de plusieurs équipes d’architectes. Dans le cadre de l’appel d’offres lancé par la ville de Berne en 2016 pour des logements coopératifs, «Wir sind Stadtgarten» avait joué le rôle de maître d’ouvrage d’utilité publique et Halter avait constitué l’équipe chargée de la planification. Dans le cadre de la réalisation du projet, la coopérative de développement «Wir sind Stadtgarten» a mis sur pied la coopérative d’habitation Huebergass (WBG), qui possède les immeubles en copropriété et en assume la gestion. Les locataires, qui sont aussi sociétaires, achètent des parts dans la coopérative et paient un loyer mensuel. La centaine de logements, allant des appartements-ateliers aux appartements familiaux en passant par les clusters, était déjà attribuée près de deux ans avant la livraison au printemps 2021. Aujourd’hui, quelque 400 personnes vivent ici, dont de nombreuses familles comme cela avait été prévu par la ville de Berne. On y trouve des gens de tous âges, dans des situations de vie très différentes. Un certain nombre de petits appartements est attribué à des sociétaires ou locataires institutionnels, qui font de la sous-location. Parmi eux, l’institution Schlossgarten Riggisberg (BE) qui accompagne des personnes avec des troubles psychiques, ou Sora Bern, une institution sociale qui encourage les familles et les jeunes adultes, dans leur capacité à vivre de manière plus autonome et leur développement personnel. Pour garantir un maximum de mixité sociale, les logements sont attribués selon certains critères, le principal étant le revenu et la fortune. Prendre ses responsabilités «Depuis plusieurs années, les projets de construction de logements sont conçus selon une approche globale en
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