Les entreprises sociales en mutation | Magazine ARTISET | 3-2023

ARTISET 03 I 2023 19 monde, elle peut même conduire à des formes de maltraitance et créer des souffrances», affirme Kathrin Roth, directrice du domaine de compétences Formation, travail et logements de la Fondation des Perce-Neige. «Bien sûr, nous défendons l’inclusion, mais dans sa granularité», c’est-à-dire selon une analyse fine et individualisée des souhaits et des capacités de la personne accompagnée, pour l’orienter vers la structure la mieux adaptée, tout en favorisant la fluidité de son parcours et en assurant la perméabilité des structures. Et parce que l’inclusion par le travail ne se fait pas uniquement au sein d’entreprises d’intégration mais aussi en institution, la fondation n’a de cesse de développer son offre d’ateliers intégrés pour des activités et des prestations professionnelles différenciées selon les habiletés des bénéficiaires. Sur les 220 «ouvrières et ouvriers» qui travaillent dans des activités de jour, avec un contrat de travail et une rémunération, une vingtaine de personnes seulement sont en intégration socioprofessionnelle individualisée en entreprise et une quarantaine dans un atelier intégré dans un environnement du premier marché du travail. Les autres sont actives dans les différents ateliers «intra-muros» de la fondation. De l’avis de la fondation, une structure de travail, quelle qu’elle soit, doit avant tout permettre une identification professionnelle, donner un sentiment d’appartenance et être un lieu d’échanges sociaux. Une transition en douceur Pour mener à bien sa mission et veiller à ce que chaque bénéficiaire arrivé à l’âge adulte puisse s’investir dans une activité respectueuse de ses besoins et de son bien-être, la fondation s’est dotée de divers outils. L’un d’eux est une formation de deux ans minimum proposée aux bénéficiaires de la fondation au terme de leur scolarité spécialisée, pour favoriser une transition en douceur entre école et monde professionnel. La première année de formation est principalement consacrée au travail sur les habilités sociales, les compétences, la motricité fine, ainsi qu’aux enseignement théoriques. Le plus souvent, cette première année permet déjà de savoir si une personne peut intégrer une structure de travail ou si elle est appelée à rejoindre un espace de jour pour des activités occupationnelles. La deuxième année s’organise autour de quatre stages de trois mois dans les différents ateliers, selon l’envie et les compétences de la personne. «Au terme de ces stages, la personne sait généralement où elle veut aller. Elle sait aussi que ce n’est pas inscrit dans le marbre et qu’elle peut changer par la suite.» Un autre outil de référence pour l’accompagnement des bénéficiaires est le modèle canadien du «processus de production du handicap» (PPH). Ce modèle inverse le paradigme: ce n’est pas la personne qui est responsable de son handicap, mais c’est son environnement qui peut être un facilitateur ou, au contraire, un obstacle dans sa vie quotidienne. Là, les maîtresses et maîtres socioprofessionnels ont un rôle de premier plan à jouer: elles et ils ont pour mission de faciliter l’accessibilité du travail, de renforcer les compétences, de veiller au bon climat de travail et, plus généralement, au bien-être des bénéficiaires dans la vie de tous les jours. Une évaluation a lieu une fois par année, qui fait l’objet d’une discussion entre la personne concernée et son entourage de référence et qui sert à définir les projets de vie des bénéficiaires. De nouveaux ateliers à venir Chaque année, entre douze et dix-huit jeunes adultes intègrent la formation, puis les ateliers. «Comme les personnes restent plus longtemps que par le passé dans les ateliers, nous manquons de place», constate Kathrin Roth. Dès lors, «tous les deux ans, nous créons un ou deux nouveaux ateliers.» Les derniers en date sont Flexmedia et CréaDesign (lire en page 20 et 21). Sont en projet, un atelier de sérigraphie et un autre de packaging pour les besoins de toute la production issues des ateliers Perce-Neige, ainsi que de nouvelles surfaces à trouver pour des places de travail supplémentaires. «Nous aurons probablement atteint notre taille maximale en 2030», estime la responsable. En attendant, «les idées et les projets ne manquent pas et nous pouvons compter sur la casquette d’entrepreneur de nos maîtresses et maîtres socioprofessionnels!», assure-t-elle. «Chaque offre de travail doit avant tout permettre une identification professionnelle, donner un sentiment d’appartenance et être un lieu d’échanges sociaux.» Kathrin Roth, Fondation Les Perce-Neige

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