Les entreprises sociales en mutation | Magazine ARTISET | 3-2023

ARTISET 03 I 2023 41 heureux du nombre de réactions provoquées par la question, sous la forme de messages écrits, mais aussi de remarques de vive voix: la plupart des gens réagissent avec enthousiasme, quelques personnes se sont dit choquées et trouvent qu’une question sur la mort, juste à côté de l’entrée d’un home, est déplacée. Un passant s’est même indigné, estimant qu’une telle démarche n’était pas du tout éthique. «C’est ne pas poser la question qui ne serait pas éthique», lui a répondu André Gyr sans hésiter. Lors des nombreuses conversations qu’il a eues avec les septante-cinq résidentes et résidents, le directeur n’a entendu aucune réaction négative: «Quelques personnes ont été agacées par certains propos futiles ou grossiers, et par les messages religieux ou malveillants», affirme-t-il. «Beaucoup de résidentes et résidents ne font pas vraiment attention aux tableaux. Pour d’autres, cela permet d’engager des conversations très animées.» De plus, ajoute-t-il, la question ne s’adresse pas particulièrement aux personnes résidant à St. Johann, mais surtout à leurs proches, aux visiteuses et visiteurs et aux gens du quartier. Comme André Gyr a pu s’en rendre compte à plusieurs reprises, les gens trouvent que l’action est bonne, même s’ils n’en parlent pas beaucoup, peut-être parce que bien qu’ils soient régulièrement confrontés à cette question durant le travail, consciemment ou inconsciemment, ils ne se la sont pas encore clairement posée pour euxmêmes. De plus, André Gyr explique que l’action a une autre grande utilité: «Nous ne voulons pas seulement nous manifester dans le cadre de la fin de vie, mais montrer que dans notre quotidien professionnel, nous sommes à l’écoute de la vie. Nous attirons ainsi l’attention des gens du quartier.» Ce qui compte finalement pour l’établissement, dont la grande majorité des résidentes et résidents provient des environs proches, ce sont les liens qui peuvent se nouer dans le cadre du travail pour le quartier et la possibilité de gagner une nouvelle clientèle: selon l’expérience d’André Gyr, beaucoup de gens font tout pour retarder l’entrée en EMS, jusqu’à ce qu’elle soit inévitable. Des actions telles que des tableaux noirs permettent de lever les obstacles. Elles ouvrent la voie pour faire entrer les gens dans le dialogue, et peut être plus tard dans l’établissement. Durant près d’une année, André Gyr a pris soin des tableaux noirs installés dans l’entrée de la maison de soins St. Johann. Et s’est laissé inspirer par les nombreux messages. Photo: cwe

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