ARTISET 03 I 2024 25 Dans les institutions pour enfants et jeunes, les abus et violences sexuelles sont des thèmes importants qui doivent faire l’objet d’une réflexion continuelle. Patrick Seigerschmidt, directeur de l’institution GO DEF, explique quels sont les principes intégrés au nouveau code de conduite de son organisation et quelles sont les mesures prises afin de maintenir un lieu protégé pour les enfants, les jeunes et le personnel Salomé Zimmermann Ce n’est pas un secret, mais les faits font tout de même peur: un enfant sur sept subit des violences sexuelles et plus de la moitié des enfants et jeunes concernés n’en parlent pas – et s’ils le font, c’est à l’âge adulte. Les différentes formes d’abus et de violences sexuelles préoccupent aussi les institutions sociales, notamment celles qui accueillent des enfants et des jeunes. Il existe des guides bien conçus, comme celui de Youvita (lire l’encadré), sur lesquels les institutions peuvent s’appuyer pour développer leur propre concept. De telles lignes directrices constituent une première étape décisive, mais leur mise en œuvre concrète au quotidien, qui demande beaucoup d’attention et d’efforts, est encore plus importante. Patrick Seigerschmidt est directeur de l’institution Gesamtorganisation Dialogweg- Eichbühl- Fennergut (GO DEF), qui appartient à la Fondation zurichoise des institutions pour les enfants et les jeunes et qui propose des logements socio-éducatifs. Il partage son expérience et explique comment, avec ses collègues, il aborde cette délicate question. Apprendre les notions de distance et de proximité «Nous sommes en train de réviser notre code de conduite, que nous combinons désormais avec les directives du standard grison», déclare Patrick Seigerschmidt. GO DEF est organisée sur trois sites, qui accueillent dans des groupes résidentiels mixtes des enfants et des jeunes issus de familles en difficulté, de l’âge de cinq ans à la fin de leur première formation. «Nos jeunes protégés doivent donc apprendre en permanence ce qui est possible de faire à quel âge et où sont les limites», explique le directeur. La question de la distance et de la proximité ainsi que l’intimité, régulièrement abordée au sein des groupes résidentiels, constitue une partie importante du travail pédagogique. «La prévention est l’une de nos priorités. La fixation et le respect des limites font partie du vivre ensemble», affirme-t-il. Pour élaborer le nouveau code de conduite, en voie de finalisation, il a sollicité l’aide du centre de compétences Limita. Il a aussi diversifié au maximum le groupe des personnes impliquées dans le projet afin d’intégrer différents points de vue et de s’assurer que le guide soit utile et adapté à la pratique. «L’ensemble du processus est un travail d’équipe», souligne-t-il. Dès que la version définitive du code de conduite sera disponible, des formations seront dispensées aux quatre-vingts membres du personnel. «Ce sera compliqué, car notre institution fonctionne 365 jours par an.» Le guide sera aussi publié sur le site Internet en temps voulu. Le taux de rotation complique la situation Quels sont les concepts à la base du nouveau code de conduite de GO DEF? «Nous plaçons la barre délibérément haut afin de donner un signal clair», explique Patrick Seigerschmidt. En effet, en cette période de pénurie de personnel qualifié, le taux de rotation est élevé, d’où l’importance d’avoir des directives exigeantes, qui permettent de maintenir un certain niveau de qualité. Chez GO DEF, par exemple, les contacts physiques doivent venir uniquement des jeunes, et non du personnel. «Nous limitons au maximum les contacts physiques, mais sommes néanmoins là pour les enfants et les jeunes qui nous sont confiés», déclare le directeur. La sympathie, par exemple, peut aussi être exprimée verbalement. «Après tout, nous ne sommes pas une famille, même si notre fonctionnement s’y apparente», indique-t-il. Un journal, dans lequel est aussi consigné tout contact physique, est tenu quotidiennement pour chaque jeune. «Cette transparence est importante pour nous, c’est pourquoi nous effectuons ce travail supplémentaire», ajoute-t-il. Des situations à risque très concrètes sont décrites dans le code de conduite, comme les rituels du coucher, les trajets en voiture ou les sorties à la piscine. Ces situations font partie du quotidien mais doivent aussi faire l’objet de réflexions et de discussions au sein de l’équipe car elles pourraient être exploitées. «Il est essentiel de prendre conscience de son propre rôle, du pouvoir et de la responsabilité qui en découlent ainsi que de la dépendance
RkJQdWJsaXNoZXIy MTY2MjQyMg==