ARTISET 03 I 2024 33 évaluer, après six ans de vie commune, l’expérience du modèle du Nouveau Prieuré et son impact sur les usagères et usagers. L’évaluation montre que la mise en œuvre du projet intergénérationnel est globalement réussie. Le rapport relate les échos positifs des bénéficiaires, des proches et du personnel, notamment quant à la qualité de vie et à l’aspect intergénérationnel enrichissant. «Selon les personnes interviewées, le projet (…) permet de s’habituer à la différence et aussi de se remettre en question. Ces éléments favorisent une évolution de la représentation des différentes populations (âgées, polyhandicapées, enfants)», écrit socialdesign SA. Améliorer la spontanéité, l’intégration et l’ouverture Les points d’amélioration identifiés par l’évaluation, et qui rejoignent les constats des membres du collège des directeurs et directrices, concernent principalement la spontanéité des rencontres, l’intégration des étudiantes et étudiants et l’ouverture sur le quartier. «Chaque partenaire a un cadre à respecter, avec des normes, des directives, des rythmes et des spécificités qui lui sont propres et qui empêchent parfois la spontanéité», reconnaît Martine Brügger, tout en assurant que les institutions ont déjà commencé à mettre en place des actions visant à renforcer les échanges spontanés et à investir davantage encore les espaces communs en y multipliant les animations: jeux, concerts, activités physiques, fêtes intergénérationnelles ou apéros. S’ajoutent un aquarium géant installé durant l’été à la place du village et un tableau de «petites annonces» pour favoriser le troc intergénérationnel. Une attention particulière sera portée sur la communication des animations et événements auprès du quartier. Le personnel aura droit à des journées d’immersion dans le style «vis ma vie», afin de mieux comprendre le contexte dans lequel évoluent les autres structures et leur manière d’accompagner les personnes, le but étant de partager de nouvelles idées pour des activités communes. À l’Étage étudiant, Amyna, 27 ans, est l’une des rares locataires présentes en cette période de l’année. Étudiante en droit, elle vit au Nouveau Prieuré depuis deux ans et apprécie la mixité du lieu. Elle officie volontiers comme bénévole lors de la fête du printemps du centre, mais n’a pas d’échanges réguliers avec les résidentes et résidents de l’EMS, les bénéficiaires de Clair-Bois ou les enfants de la crèche. En revanche, elle a tissé des liens étroits avec un couple de seniors de la Résidence de La Gradelle, un immeuble avec encadrement qui appartient également au BCAS. Tatiana Butinof, directrice à la fois de l’Étage étudiant et de la Résidence de la Gradelle et membre du collège des directeurs et directrices, concède que les échanges entre les étudiantes et étudiants et les autres bénéficiaires du centre ne sont pas encore assez nombreux, principalement en raison d’horaires incompatibles. Mais elle ne manque pas d’idées pour ouvrir les activités de la Résidence de La Gradelle aux usagères et usagers du Nouveau Prieuré, notamment des spectacles et la présence d’un bibliobus un mercredi sur deux avec des animations diverses. Elle a également obtenu des tarifs préférentiels pour encourager les étudiantes et étudiants à fréquenter le restaurant Le Trait d’Union à la place du village. Des dynamiques positives Du côté de Clair Bois, on se félicite de cette belle réussite, gage de socialisation, qui place les personnes polyhandicapées au cœur de la vie, au contact d’autres populations. «Ce qui est génial c’est de pouvoir nous reposer sur un dénominateur commun, l’intergénérationnel et l’inter-populationnel, malgré des perspectives différentes en termes de projets de vie des bénéficiaires», souligne Pierre Coucourde, directeur général de la Fondation Clair Bois. Cependant, à l’entendre, le modèle du Nouveau Prieuré devrait s’éloigner davantage encore de la voie institutionnelle. «La géographie des lieux fait que chaque institution à une tendance naturelle à rester dans ses quartiers et n’en sortir que pour des moments partagés particuliers.» Dès lors, l’enjeu est de tendre vers une plus grande ouverture, voire une désinstitutionalisation, avec des logements plus indépendants, une plus grande mixité dans les bâtiments du Nouveau Prieuré et une plus grande intégration dans la vie de quartier. Cela implique de revisiter le concept régulièrement, sachant qu’il est implanté dans un quartier qui bouge et se structure rapidement. «Cela demande aussi un effort intellectuel pour toujours garder à l’esprit les autres partenaires et voir ce qu’on peut faire ensemble. Les équipes sont très ouvertes et les dynamiques sont positives pour tout le monde», se réjouit Pierre Coucourde. «Il y a beaucoup d’activités et d’interactions possibles à mettre en place pour favoriser la rencontre entre les différentes populations.» Martine Brügger, directrice de l’EMS Le Nouveau Prieuré L’actu
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