Développer et mettre en place des innovations

22 ARTISET 02 I 2023 quotidien des enfants. Les parents et les proches ont été associés à la démarche pour compléter ce vocabulaire de base. L’équipe s’est également appuyée sur les travaux de Isaac Francophone, l’association internationale pour la communication alternative et améliorée. «C’est fou de voir tout ce qu’on peut raconter avec vingt-quatre images!», s’exclame Jean-Michel Ripoll. Les pictogrammes de l’éventail ont été reproduits sur deux planches de format A4, comportant douze pictogrammes chacune, collées sur les tables de la salle à manger et sur les tablettes des fauteuils roulants. À ce vocabulaire de base s’ajoutent d’autres pictogrammes spécifiques, liés à des activités particulières telles que la musique, la confection de biscuits, le jardinage, les jeux, etc., ou à des situations propres à chaque enfant. Pour que ce vocabulaire illustré soit accessible à tout le monde et en tout temps, indépendamment des capacités motrices, cognitives ou sensorielles, l’équipe éducative a identifié pour chaque enfant ses modalités privilégiées de communication, puis déterminé l’équipement nécessaire à mettre à portée de main de l’enfant. «Les vocalises et les signes sont les modalités les plus simples: on les a toujours sur soi. Mais si l’enfant doit avoir recours aux pictogrammes pour s’exprimer, nous devons alors veiller à ce qu’il les ait toujours sous la main», explique l’ergothérapeute. Et celui que Marc Gance surnomme «GéoTrouvetou» a toujours une solution pour chaque situation. Responsable de la téléthèse, c’est lui aussi qui gère et paramètre les outils technologiques. Par exemple, tous les enfants ont leur propre tablette tactile, avec le vocabulaire de base et les pictogrammes spécifiques ainsi qu’une synthèse vocale. Certains disposent d’un ordinateur avec contrôle visuel. «Il faut être très créatif et bien connaître les enfants. Surtout, on n’y arrive pas tout seul. C’est une collaboration transdisciplinaire.» La clé: la modélisation Malgré un fort engagement de longue date, ce langage peine toujours à s’imposer au quotidien. «Depuis des années, nous mettons en place des outils pour développer un nouveau langage pour les enfants. Mais dans leur entourage, presque personne ne le parle…» En 2018, Jean-Michel Ripoll assiste à un congrès de Isaac Francophone à Fribourg. Et c’est la révélation: la modélisation! «En général, l’enfant se développe par imitation, dès sa naissance. Il n’attend pas d’aller à l’école pour apprendre à parler. Eh bien, ici, le principe doit être le même, indépendamment de la capacité de compréhension de l’enfant», explique Jean-Michel Ripoll. Il s’agit désormais de créer ainsi un «bain de communication» commun en incitant toutes les personnes qui interviennent auprès des bénéficiaires à utiliser au quotidien les pictogrammes comme un langage partagé. «Il faut montrer l’exemple en pointant systématiquement les pictogrammes, en sous-titre de notre langage oral. Les résultats ne sont pas immédiats, cela peut prendre des mois, mais il ne faut surtout pas se décourager!», insiste-t-il. Il y a des moments stratégiques pour utiliser les pictogrammes: le temps de l’accueil le matin ou le départ en fin de journée, les moments où l’enfant peut exprimer ses choix, comme pour le repas ou l’écoute de la musique. Pour donner aux enfants une chance de reconnaître les mots qu’ils peuvent utiliser, il faut les leur montrer tout le temps, comme une routine quotidienne. Ce n’est pas encore gagné, reconnaissent Marc Gance et Jean-Michel Ripoll. Mais l’éventail devient un outil de la fondation et les équipes des différents pôles travaillent davantage en transversalité, favorisant la continuité de l’outil au gré de l’évolution des bénéficiaire, entre l’enfance, la jeunesse et l’âge adulte. L’éventail de communication intéresse aussi hors des murs de Clair Bois. Il est utilisé dans d’autres établissements pour personnes en situation de handicap, par des associations de parents, dans des écoles spécialisées et dans certains EMS qui accueillent des personnes âgées atteintes de troubles cognitifs. Enfin, une version spéciale a été conçue pour les hôpitaux afin de faciliter la communication, en quatorze pictogrammes, avec le personnel soignant et le corps médical. Un éventail a été spécialement conçu pour les hôpitaux avec quatorze pictogrammes. Photo: amn

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